À partir du mot « diaspora » – Mettre en récit la traite et l’esclavage et défaire la modernité.
Dans cette conférence, Christine Chivallon questionnera les usages du mot « diaspora » pour qualifier l’expérience humaine issue de la matrice esclavagiste aux Amériques
Par Christine Chivallon, géographe et anthropologue, directrice de recherche au CNRS.
Le propos de cette conférence sera consacré aux usages du mot « diaspora » pour qualifier l’expérience humaine issue de la matrice esclavagiste aux Amériques, matrice où s’accomplit la déshumanisation des personnes d’origine africaine mises en esclavage.
Tout au long des années 1990-2000, ces usages se complexifient quand la notion de « diaspora » fait l’objet de débats en phase avec l’émergence des courants postmodernes et postcoloniaux. Les approches des sociologues Paul Gilroy et Stuart Hall viennent bousculer une vision classique de la « diaspora africaine » fortement associée à des identités racinaires restées reliées à l’Afrique en ayant transcendé l’horreur de l’esclavage. Ces nouvelles approches se consacrent plutôt à développer une tout autre conception où se précise l’idée d’hybridité dégagée d’attributs territoriaux, ethnicistes et essentialistes.
D’autres perspectives, comme celles d’Edouard Glissant, ouvrent quant à elles sur un univers où la dépossession violente depuis l’Afrique éradique l’idée de continuité et prolonge la perte dans les espaces clos de la plantation.
Ces débats, même s’ils paraissent aujourd’hui propres à une « période paradigmatique » datée, conservent cependant une actualité d’où ressort la permanence de questions qui mettent en jeu le rapport constitutif à l’expérience de la traite et de l’esclavage pour les membres de la « diaspora » en tant que producteurs de récits où « l’Afrique et l’esclavage » – selon l’expression de l’anthropologue David Scott – « sont différemment mis en usage » et donnent lieu à une « pluralité discursive ».
Cet ensemble discursif dont l’usage différencié du mot « diaspora » permet de cerner les contours forme également le point d’ancrage le plus déstabilisant de la critique de la modernité occidentale en révélant d’une manière ou d’une autre l’ampleur de la barbarie du projet sur lequel elle s’est édifiée.
Conférence s’inscrivant dans le cadre d’une série d’évènements scientifiques proposés par la Chaire DiANA T [Diasporas Africaines en Nouvelle-Aquitaine & Transculturalité] de l’Université Bordeaux Montaigne, financée par la Région Nouvelle-Aquitaine, rattachée au laboratoire Les Afriques dans le Monde (LAM – UMR 5115), et portée par MM. Sylvère Mbondobari et Sylvain Racaud.
L’objectif de cette chaire est d’étudier scientifiquement les enjeux que la présence de diasporas implique dans l’expression de la diversité culturelle, sociale et politique. La chaire entend ainsi développer une nouvelle approche des communautés transculturelles à partir d’une étude des transferts culturels qui embrassera l’ensemble du champ culturel, politique et intellectuel (acteurs, institutions, médiateurs, etc.). Plus d’information sur le blog de la Chaire : https://dianat.hypotheses.org/
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